Mère Nature

Ce texte a été écrit il y a plusieurs mois. C’est surement parce qu’il retransmet une vulnérable intimité qu’il n’avait jusqu’alors pas été partagé. J’ai l’élan de le faire aujourd’hui.
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Aller voir la mer,
Aller saluer la Mère,
Se laisser envahir par le bruit des vagues pour éviter de ressasser.
Et puis, quand la mer est moins audible, c’est le vent qui prend le relais. Comme une magnifique orchestration de la nature pour m’éviter de m’entendre penser.

Le chemin faisant, j’entends le chant des oiseaux qui se mêle au bruit des vagues et au son du vent. Je sens le soleil sur ma peau. En fonction de où je suis sur le chemin côtier, la sensation sur mon visage n’est pas la même. Je suis dans l’écoute de mon corps, ça m’évite de ressasser.

Alors oui, on le sait, ressasser, c’est mal. Ou plutôt, ça ne sert à rien, ça abaisse le niveau d’énergie, ça polue. ça vous ruine, ça vous détruit à petit feu. Ressasser, c’est un peu comme une drogue. Sauf qu’on n’en parle pas souvent en ces termes. Et pourtant, si on n’y prête pas attention, on pourrait ressasser constamment, comme une addiction silencieuse et invisible. Aucun membre du corps médical, aucun scanner, IRM ne pourraient détecter cette mise en danger pour la Vie.

Je suis là avec le vent, la mer, le chant des oiseaux… Je suis avec les éléments. Au loin, je vois une planche à voile. Et je me dis que tout à l’heure, j’ai pensé à mettre mon maillot de bain pour me plonger dans ces vagues. Je ne sais pas si j’aurai été grandement capable de rentrer dans l’eau comme certaines personnes. Je voyais là la purification et l’apaisement des douleurs de mon corps que la mer m’apporte pour atténuer mes maux.

Je n’ai pas le sentiment d’être seule ce matin, sur le chemin côtier. Je me retourne plusieurs fois, c’est assez déroutant. Pourtant à chaque fois, je suis seule. En tout cas physiquement. Une impression de déjà vu (d’avoir déjà vécu ce type d’expérience).

Je poursuis ma marche quand les larmes me submergent. Je prie. Je ne prie pas pour la paix dans le monde, pour une noble cause. Non. Je prie pour ne croiser personne. Je prie pour pleurer en toute liberté. Parce que même le regard d’un parfait étranger, je ne pourrais le soutenir au vu de mes larmes qui se sont intensifé maintenant. Je pleure à gros bouillon, submergée par ma vie. Je me sens aussi impuissante dans cet instant que j’ai le sentiment de l’être dans cette période de vie. Puis, je traverse la plage, et d’un coup, je me retrouve dans ce cocoon d’arbres. Mère Nature me prend dans ses bras. Cela n’arrête pas mes larmes de couler. C’est si doux à recevoir. Déroutant aussi, comment la Nature peut-elle être présente pour moi plus que n’importe quel autre être humain ?

Je continue de marcher, de pleurer, de prier. Puis, sur le chemin du retour, mes larmes commencent à s’assécher. Et je remercie de n’avoir croisé personne. Merci d’avoir libéré le chemin pour moi ce jour-là.

Je sors de ce cocoon et la lumière m’éblouit, me fait presque chavirer. Je me maintiens à l’aide de la balustre blanche pour descendre les escaliers. J’ai le sentiment que mon corps tangue et j’entends cette phrase :
– « Je ne suis pas digne de te recevoir ».
Et comme pour me répondre, le soleil intensifie sa lumière. Il ne m’éblouit que davantage. J’entends à nouveau :
– « Je ne suis pas digne de te recevoir ».
Mais à cet instant-là, je comprends que je ne peux pas lutter. La lumière est là pour moi, que je le veuille ou non. La lumière est là, pour chacun d’entre nous. En drive, sans avoir besoin de passer commande. Je souris devant cette ironie de la vie ou cette beauté de l’instant que je vis.

Merci Mère Nature.

Texte & photo © Nadège Depresle

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